MADELEINE WEIL-LESTIENNE

BIOGRAPHIE - SOUVENIRS

Dans la rue à Péronne

La maison s’avance dans la rue. L’alignement n’existe guère dans cette vieille ville. Une curieuse fenêtre basse au milieu du mur dépasse. Elle se situe dans le boudoir (c’est bien prétentieux, elle en est la raison d’être). De là on découvre toute la rue et rien n’échappe des entrées et sorties des gens du quartier. On vient là pour coudre un peu et regarder au dehors. Une chaise, une toute petite table, c’est tout ce que l’on peut mettre dans cette minuscule pièce.

Je te l’ai dit, je regardai le ciel, le beau ciel changeant de la Flandre, la rue, les pavés, l’herbe, les fières maisons bourgeoises aux volets clos. Parfois, bien en rang, les petites orphelines entraient pour apprendre à coudre à l’Ouvroir (un bien joli mot) qui se trouve tout à côté de chez nous ; des religieuses les accompagnaient dans leur élégant costume.

Le long du salon, le couloir et la porte de la rue qui permet l’entrée des visiteurs, sa clochette au son familier, sa porte aux carreaux de vives couleurs, conduit, si on le désire, directement à la cour et au jardin. Chaque matin, la boulangère se présentait à cette porte et venait vendre son pain. On lui prenait du pain noir, moins cher, pour Diane. Elle portait à la ceinture un trousseau de réglettes en bois au nom de chaque client et donnait un petit coup de scie pour chaque pain vendu.

C’est par là que Tib (pour Tiburce, ndlr), mon oncle, est arrivé en uniforme la veille de la grande guerre (août 1914). J’étais dans la cour et j’ai été émerveillée de le voir si beau, aussi beau que lorsque je l’avais connu, un an et demi plus tôt, alors qu’il était le fiancé de Tante Gaby. Tib et Gab … histoire à suivre.

A suivre ...

Le trousseau de la boulangère

Péronne