MADELEINE WEIL-LESTIENNE

BIOGRAPHIE - SOUVENIRS

4e partie : De la rue Perceval à la Butte aux Cailles (1930-1939)

Porte du 8 bis Passage Barrault Paris 13e

L'installation à l'atelier

Notre mariage en 1930 est une époque d’activité intense et je ne peux tout te dire. Il faut regarder nos œuvres : Lucien peint sa mère, sa jeune épouse, quant à moi je représente souvent mes grands-parents.

Notre rythme de vie s’organisait peu à peu, avec une exposition chaque année et beaucoup de progrès à faire. Je vois le couloir étroit de l’appartement rue Perceval encombré, bloqué par une caisse énorme et coûteuse. Par la suite nous rangions les toiles dans de vieilles malles à l’ancienne, les cadres entassés comme des assiettes empilées. Allier l’art et les finances… : il nous fallait créer les affiches, les invitations, les listes et nous rendre à Colmar, Douai, Strasbourg, Mulhouse, Lille, Paris.

De notre architecte, qui fut un conseiller très amical, j’ai retrouvé le dessin de la grille de la porte d’entrée réalisé en 1933, du Passage Barrault, le terrain étant déjà acheté. Petit-père était notre comptable et, comme il l’avait prévu, donna la dot de sa fille. Notre contrat fut celui de la communauté réduite aux acquêts, Lucien n’ayant que ses peintures. Nous achetâmes donc 10 mètres d’un alignement de très vieilles maisons sur la Butte aux cailles, de très mauvaise réputation, mal fréquenté, percé de carrières, enfin ce qui nous coutait le moins cher ; nous pensions mettre sur le petit jardin un hangar-atelier. Il y eu des conseils puis l’emprunt. L’atelier fut installé au second étage et de trop petits logements au premier (l’architecte nous dit que ce serait des revenus pour nos vieux jours). Mon Lucien, grâce aux lois dites sociales, ne reçu que soucis, envies et haines.

L’atelier était vaste et beau, conçu à l’image de notre bonheur à deux, deux peintres inséparables pour le quotidien et la peinture. C’est donc enivré d’espace et de lumière qu’il fit le grand tableau «famille et amis».

Parmi mes souvenirs amusants, notre métier étant officiellement nommé « aléatoire », le contrôleur des impôts voulant le constater, nous rendit visite et accepta les explications données : tout était frais professionnels, les seuls bénéfices réels étant nos repas.

A suivre ...

Nous rangions les toiles dans de vieilles malles à l’ancienne

Lucien au travail

Deux peintres inséparables pour le quotidien et la peinture